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MASSESCRITIQUES

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L'universel un idéal dépassé ?

Publié le 24 Février 2018 par Fabrice Guillaumie in critiques sociales

L'universel un idéal dépassé ?

L’universalité de la conscience morale est-elle une illusion ?

 

 

« C’est presque une loi de l’histoire : un universalisme qui se constitue n’en remplace jamais complètement un autre, c’est pourquoi les conflits sont susceptibles d’être réactivés. C’est aussi la raison pour laquelle je trouve Hegel si intéressant, à condition de le lire à rebrousse-poil : il n’a cessé de travailler sur le conflit des universalismes, en particulier le christianisme et les Lumières, en espérant « dépasser » leurs contradictions.

Or, ce que nous observons aujourd’hui, c’est que les universalismes religieux sont plongés dans une crise interminable, tandis que l’universalisme fondé sur les droits de l’homme est entré lui aussi dans une crise profonde. Un universalisme dont la crise n’est pas achevée face à un universalisme dont la crise ne fait que commencer, voilà ce qui, entre autres, explique la violence de la confrontation. » 

Etienne Balibar - Des Universels - Galilée

 

 

 

 La conscience du bien et du mal n’est pas hors de l’histoire, elle n’est pas un universel détaché du temps et de l’espace qui s’imposerait sous la même forme quel que soit le lieu quel que soit le temps. Selon les cultures et qui plus est selon les climats dirait Montesquieu (qui observe une variation des moeurs en fonction de la géographie des climats) mais aussi selon les rapports de forces entre puissances voire même la forme anthropologique de la structure familiale (E. Todd) les moeurs varient et ne cessent de varier aujourd’hui encore, y compris au sein d’un même groupe culturel. Cela veut dire que les valeurs de la conscience morale ne sauraient être toujours identiques même si la recherche et l’inquiétude pour la détermination des valeurs - quand bien même nous choqueraient-elles comme l’excision en Afrique, la solution finale nazie menée au nom du bien de l’humanité, ou encore l’inceste des monarchies Egyptiennes etc...  - demeure bien un invariant culturel. Si l’universalité de « La » conscience morale n’existe pas (ce que nous avons tendance à oublier en nous cachant derrière l’apparente universalité des droits de l’homme ou celle du judéo-christianisme qui arrange bien la domination culturelle occidentale) force est néanmoins de constater l’impossibilité de vivre sans tenter de rassembler ce qui est épars derrière un périmètre d’us et coutumes traduits en un discours moral qui fixe les bornes du permis et de l’interdit. Il faudra donc distinguer l’illusion métaphysique d’une conscience morale dont les conclusions ne cessent de varier en fait, et la recherche universelle et inquiète de normes susceptibles de guider les comportements par cette conscience, que l’on peut se dispenser de qualifier de « morale » s’il est largement temps comme on le verra d’en abandonner comme les présupposés imaginaires.   Rationaliser l’espérance nécessaire à la raison en tant qu’idéal du bien ne devrait-il pas en passer par l’abolition de cette croyance illusoire en une bonne conscience de l’homme, dont rien ne prouve au vu de l’histoire et du présent qu’il soit bon et généreux par principe, ni plus moins que l’inverse. Ni bonne ni mauvaise l’humanité peut-elle faire autre chose que de se débrouiller au-mieux avec les circonstances, en évitant si possible la magie arrogante des discours universalistes ? Faut-il préférer avec Aristote « la prudence » à « l’exaltation » des valeurs du bien et du mal ou continuer à penser que les plus forts  détiennent seuls la clef du moralement correct ?

 

 

 

                Toute conscience du licite et de l’illicite est donc gouvernée par un contexte socio-historique en tension, qui aujourd’hui même parait bien en crise en occident pour autant que l’universalité du discours moral des « droits de l’homme » sur lequel reposerait notre conscience aujourd’hui - ne répond plus avec clarté et certitude au généreux et limpide discours issu des Lumières. Pas plus d’ailleurs que le généreux discours universaliste du Christ - l’amour du prochain - ne répond clairement à l’actuelle crise migratoire qui pourtant semble  laisser de marbre les bons chrétiens tenants des crèches dans les mairies.

On peut observer les effets de cette disjonction morale dans ces débats qui questionnent aujourd’hui cruellement notre conscience occidentale : 

 

  • jusqu’où faut-il laisser la liberté aux scientifiques de manipuler le génome ?
  • L’intelligence artificielle (I.A) améliorera-t-elle toute l’humanité ou seulement les plus riches ?
  • Faut-il s’ingérer uniquement dans les dictatures qui sont des clients ?
  • L’augmentation sans précédent des richesses (mais aussi de la pauvreté) profite-t-elle au plus grand nombre ?
  • A quel âge fixer la limite du consentement sexuel ?
  • Les inégalités de salaire homme/femme sont-elles justifiées par la compétence où par la contrainte biologique de la naissance et une odieuse phallocratie culturelle ?
  • L’absence de tout contrôle démocratique des décisions politiques fait-elle de la France un pays politiquement arriéré au regard des pays nordiques ?
  • La ghettoïsation urbaine des diplômes scolaires permet-elle un renouvellement de l’intelligence collective ou bien favorise-t-elle la reproduction mentale et culturelle au risque de scléroser l’intelligence collective ?
  • Jusqu’où devons nous assumer judiciairement les actes terroristes de nos concitoyens intégristes prisonniers à l’étranger ?
  • Faut-il des chefs en démocratie pour faire fonctionner l’administration centrale ?
  • Est-il bon que l’Etat intervienne dans le marché de l’Art et fabrique la côte des artistes ? 
  • Etc..... 

Si l’universalité morale des droits de l’homme (propriété, sécurité, liberté de penser et d’entreprendre, égalité des droits) suffisait hier à répondre aux problèmes d’une société monarchique, on se doute que deux cents cinquante après, la situation n’est plus la même et que l’ordre de la pensée napoléonienne n’est fatalement plus en phase avec l’évolution contemporaine des moeurs et des idées.

Dans toutes ces questions de société c’est le triptyque républicain de la Liberté de l’Egalité et de la Fraternité qui est malmené en raison de la priorité du premier principe de liberté devenu absolu et institutionnellement incontrôlable au regard des deux autres. Plus particulièrement c’est la « liberté individuelle des modernes » qui a été socialement sacralisée et rendue intouchable au détriment de « la liberté des anciens » (pour parler avec Benjamin Constant en 1819) pour lesquels la dimension collective  régulait prioritairement les comportements individuels du licite et de l’illicite. Désormais la loi ne doit plus contraindre qu’au seul niveau régalien et faire exception pour l’économique et le politique qui protège et organise cette licence des puissants et des privilèges (Cf. « Vincent tout puissant »  J.P Canet et N. Vescovacci - Mars 2018). Il va de soi que les dictatures collectivistes ont pu un temps justifier au XXème siècle (jusqu’à la chute du mur de berlin et l’épuisement du castrisme) cette priorité nécessaire de l’individuel sur le collectif, de l’effort personnel sur l’interêt général , de la richesse matérielle sur la culture mais « moralement », nous qui sommes conscients de ces contradictions sociales, comment pouvons nous en tolérer plus longtemps le spectacle humiliant quoique constamment réitéré sous nos yeux hypers informés ? Comment ce qu’il nous reste de « conscience morale » ne peut-il pas être suspecté d’illusion si le principe d’universalité censé la guider n’est plus interrogé au point d’être considéré comme un nouveau tabou , plus dérangeant même que la liberté sexuelle  ?!!  Pour quelles raisons n’osons nous plus remettre en question les fondements d’une société propre à une situation politique, culturelle, diplomatique et technique datant maintenant de plus de ... deux siècles ? Et à qui profite ce silence pesant de nos consciences impuissantes face au spectacle dégradant  d’une nouvelle barbarie rampante de l’espèce humaine : celle du mur de l’argent  ?

 

 

               A force de relativisation du problème, d’innocence feinte ou de cynisme assumé, on aurait donc fini nous autres les modernes occidentaux par faire de la question morale un tabou bien plus insurmontable que le tabou sexuel dont la société a réussi plus ou moins à s’émanciper, en admettant par exemple dans la norme juridique de la moralité (ou le bien fondé) le mariage homosexuel. Bien sûr cette norme du bien n’est pas partagée par la partie réactionnaire de la société. Toutefois dans ce monde désenchanté - ce qui n’est pas nécessairement une perte au regard de ce qu’en fit le passé - il est devenu inconvenant de parler de buts existentiels, d’utopie collectives, de partage des libertés, de spiritualité laïque etc...  (champs intellectuels jadis dévolus à la conscience morale), questions tabous qui par contre se présentent comme une mutilation de la raison, privée de perspectives non marchandes. Tout se passe comme si chaque jour que le capitalisme fait,  il devenait plus problématique que les hommes « assignent au travail de toute leur vie cette seule finalité de descendre, le jour venu, au tombeau, lourds du poids matériel considérable de leur argent et de leurs biens » Max Weber - « L’éthique protestante et l’esprit du capitalisme » 1905.

Toutefois cette évolution des normes morales dans la société actuelle n’est pas anachronique ni le fruit du hasard. Si « notre » conscience morale (faut-il vraiment l’écrire au singulier ?) d’occidentaux se retourne sur son passé, elle pourra constater un lent mais inexorable processus de sécularisation. A partir du polythéisme grec des sociétés holistes (le tout prévaut sur l’individu) jusqu’à la nouvelle loi chrétienne du pardon individuel, l’évolution de la pensée occidentale se bâtit sur un processus de sécularisation que le triomphe pratique et économique de la pensée protestante ne fait que confirmer (cf. « Pop Théologie » de Mark Alizart, 2015). C’est un poncif de reconnaître qu’aujourd’hui les sociétés ont renoncé à la grandeur, au Sacré, au collectif, au bien commun, mouvement amorcé dans les arts dés le dix huitième siècle avec la montée critique des autorités politiques : l’ironie, le persiflage, le vitriol finirent par ruiner et épuiser les prétentions morales et discours édifiants des papes du savoir comme du pouvoir. A partir du moment où dans son « Discours de la méthode » (1637) René Descartes autorise la conscience morale à se penser comme un « je »  autonome afin d’identifier en son sein un principe universel qu’il admet fialment ne trouver que dans l’abstraction du discours - son espoir de parvenir à résister  à la vague montante du scepticisme au-moins depuis les « Essais » de Montaigne (1592) n’a fait que produire l’effet inverse. Le doute cartésien est devenu non plus cet allié de la foi qu’il promettait d’ être mais au contraire le dissolvant de tout principe moral (critique de la bonne universalité du catholicisme) , politique (critique du bien fondé du droit divin des monarques, puis constitution des loges Maçonniques) mais aussi esthétiques (Jonathan Swift raille la religion qui ne sert qu’à faire la guerre, Laurence Sterne dans « Vie et opinions de Tristram Shandy » en 1760 ironise sur les autorités intellectuelles de son temps et Diderot se moque déjà du spectacle de la cour dans « Le neveu de Rameau » en même temps qu’il participe au renouvellement du savoir avec « L’Encyclopédie » aux positions politiques radicalement affichées contre l’église et la monarchie. Pendant ce temps Voltaire écrit son « Dictionnaire philosophique » ( sous titré « la raison par l’alphabet » et non plus par la foi ! ) lequel sera cloué sur le torse du malheureux chevalier de La Barre au moment de sa mise au bûcher pour hérésie à la bonne universalité catholique. Dés lors, inexorablement, triomphe l’empirisme de « L’essai sur la réforme de l’entendement humain » de John Locke (1689 bases de la laïcité) lequel met à mal la traditionnelle conscience morale qui s’affranchit en sécularisant les dogmes de l’ancienne croyance catholique partout désavouée. Faire le bien n’est plus l’apanage du catholicisme, « l’athée peut également être vertueux » (Pierre Bayle- 1680). Cette longue histoire de la sécularisation des valeurs judéo-chrétiennes est très clairement décrites dans les travaux méconnus de Paul Hazard (meurt en 1944) auxquels on renvoie : « La crise de la conscience européenne 1680-1715 » et « La pensée Européenne au XVIIIème siècle, de Montesquieu à Lessing ». Tout se passe alors au XVIII° siècle  comme si l’ironie de Rabelais et Cervantés renforcée par les nouvelles vérités (au pluriel désormais) des sciences empiriques, aidaient la conscience morale à sortir des illusions de l’enfance pour entrer dans l’âge mûr de la raison, affranchie et individuelle. 

 

 

         Désormais, en dépit de l’ancien interdit moral, le corps, la nature, la matière existent à part entière et on doit être capable de les penser sans exclusive (Spinoza en sera le précurseur dans Ethique 2 « nul ne sait encore ce que peut un corps » c’est la matière qui est devenue infinie), ce qui implique une diversité et une multiplicité que l’ancienne métaphysique de la conscience morale ne pouvait admettre dans sa géométrie euclidienne tellement abstraite. Mais si « dieu est mort » comme le prophétisera Nietzsche à la fin du XIXème siècle, on peut alors se demander ce qu’il restera d’une conscience morale sans principe divin désormais pour la diriger a priori dans sa recherche du bien ? En effet pour les modernes orientés selon une démarche désormais empirique à l’image de protocoles scientifiques, aucun a priori moral ne peut plus résister face à la diversité de la nature et à l’insondable vacuité du cosmos qui est qu’on le veuille ou non « par delà bien et mal ». La dernière morale affichée, celle des Devoirs kantiens, n’a elle-même finalement pas pu résister au XVIIIéme siècle (même si elle parviendra à se perpétuer de manière assez floue dans la Franc Maçonnerie Française qui postule encore un discours moral mais sans en préciser les contours sinon dans la vacuité de principes dont elle ne sait plus que faire ne pouvant plus les appliquer désormais : opposition confuse de la liberté individuelle et de l’égalité des droits, laïcité proclamée dans une société toujours plus communautarisée etc... , on observe que les rituels ressassent un passé décalé dans le présent que seules l’habitude et la psalmodie préservent encore mais pour combien de temps ? ) : « le kantien a les mains pures mais il n’a pas de mains » dira Péguy (« Victor Marie comte Hugo » - 1910) se moquant du formalisme et de l’intégrisme moral de Kant que Benjamin Constant avait déjà largement raillé dés 1796 ( dans « Tout le monde n’a pas droit à la vérité ») : en effet, contre l’intégrisme moral de Kant puisque désormais affranchis de la tutelle des églises il existe bien dira Benjamin Constant « un droit de mentir par humanité » et cela aucune conscience morale à strictement parler ne pourra le tolérer. Tout se complique donc désormais au XIXème siècle où l’on découvre que s’il existe une règle quelque part pour juger de nos actions, il ne peut plus s’agir d’une règle de fer inflexible mais qu’au contraire il va falloir manier une règle de plomb assouplie en fonction des évènements et des circonstances. Contre la fermeté illusoire et inopérationnelle des principes pris dans une stricte égalité, nous voila mis au pied du mur désormais d’une justice plus juste et moins abstraite, qui ne se paye plus de mots, en un mot plus équitable (donc sans règle ni équerre possible) et considérant (par le seul fil à plomb et le compas comme il se doit chez l’architecte opératif qui fait sans se contenter de dire) le mérite selon les circonstances et non plus seulement la tradition ou l’héritage. 

L’affaire n’est pas nouvelle ! Aristote déjà dans « Ethique à Nicomaque » V,14. (322 av. JC) avait montré comment en toute raison « l’équité est un correctif nécessaire à la loi » pour une justice plus éclairée et mieux répandue. Il n’y a donc pas d’autonomie de la raison sans un certain usage de la vertu entendu non plus au sens chrétien monothéiste de soumission à des ordres émanants de traditions autoritaires, mais bien au sens grec de la vertu comme force, vigueur et courage. Nietzsche pétri de culture Grecque renversera ainsi son propre christianisme protestant issu de sa tradition familiale en parlant de « relent de cruauté » au sujet de la conscience morale (de Kant) qu’il fait voler en éclat dans son concept (si mal compris d’Hitler car il n’y a pas de peuples élus pas plus juif qu’allemand ni autres mais seulement des individus pour Nietzsche) de « volonté de puissance » : la conscience morale comme soumission a priori à des principes, est une illusion que les faibles en se coalisant ont imposé avec le temps aux forts, hélas victimes de leur solitude intellectuelle et de leur petit nombre. Cette dictature de la morale prescrivante (qui semble revenir en force aujourd’hui) serait en réalité la marque de la faiblesse de la raison occidentale incapable d’intégrer la différence, l’autre, l’étranger, le cas particulier, l’évènement,  l’impondérable auquel elle préférera toujours les grands nombres, comme le capitalisme contemporain privilégie toujours abusivement l’industrie sur le petit artisan... Préférant à la logique du monde et des choses, son propre discours missionnaire et exterminateur « la » conscience morale lorsqu’elle est comprise comme un dogme auto-suffisant a largement montré ces dernière décennies son impuissance dévastatrice  en raison d’ une universalité non partagée (d’où le colonialisme et le règne d’un capitalisme d’héritiers tout puissants cf. Thomas Piketty « Le capital »). 

Désormais il est donc admis qu’ Il n’y a plus de morale du seul devoir au sens où la règle du bien du beau et du juste serait prescrite par avance au cordeau. Cette illusion probablement fondée en même temps que le monothéisme de Paul de Tharse (livre des actes des Apôtres 17.22-31 reprochant sournoisement aux Grecs d’avoir osé élever un temple aux dieux étrangers et donc souillé par un contact dangereux avec la complexité dérangeante de ce monde, l’unicité parfaite - quoique trinitaire - du grand architecte) est tombée au XXème siècle : boucherie de 14-18, shoah, Hiroshima, Nagasaki, Algérie etc ... partout l’angélisme exterminateur de la conscience morale d’un bien universel rapporté seulement à soi-même, a montré son odieuse arrogance qu’un professeur de l’Ecole Nationale de l’Administration a si bien résumé dans son cours introductif qui commençait toujours par la remarque suivante : « ICI ON NE RECRUTE PAS L’AUTRE ON RECRUTE LE MÊME ». Tout est dit et tant pis pour la civilisation !

 

 

 

 

     Pour conclure on dira que sauf à « Se divertir à en mourrir » (Neil Postman -1985) ou ce qui revient désormais au même travailler jusqu’au mépris de soi-même et des siens (Christophe Dejour « Souffrances en France, la banalisation de l’injustice sociale » - 1998), la conscience morale s’est d’emblée construite comme une illusion en raison d’une vision théologico-métaphysique de l’universel, imposé depuis le départ par la férule du pouvoir monarchique qui a su y trouver son intérêt (le barbare Clovis se baptise pour des raisons politiques puis fonde pour plus d’un millénaire l’héritage masculin de la loi salique). Mais sommes nous vraiment sortis de cette monarchie de l’universel le plus souvent incarnée par le culte passif de l’homme providentiel ou du simple chef dans une moindre mesure ? Même si la tradition Grecque a manifestement préféré l’Ethique non écrite a priori, à la morale prescrite elle, a priori mais sur un principe de crédulité (par exemple la bonté occidentale de l’homme qui reste à démontrer),  nous sommes forcés de constater son triomphe historique par sa transmission héritée jusqu’à ce jour dans notre culture. Et ce au risque d’inverser historiquement les grandeurs : il est en effet plus facile aujourd’hui de parler de sexe, de pouvoir et d’argent que de Sacré et d’Universel d’un point de vue pragmatique et cosmopolitique, lesquels semblent devenus les nouveaux tabous d’une époque qui s’affiche pourtant comme émancipée ! Mais la marche forcée vers la sécularisation des valeurs entamée au XVIIIème siècle grâce à l’alliance conjointe du scepticisme libérateur et de l’empirisme pragmatique doit pouvoir  nous hisser jusqu’à un « universel sans totalité » selon Pierre Lévy (cité par R. Debray dans « Dieu un itinéraire » p. 378)? Cet universel sans dogmes ni croyances serait rendu assurément possible par les nouvelles arborescences et flux multiples de la révolution du nouveau monde numérique actuel, dont nul ne prend (ou plutôt ne veut prendre) encore la mesure de la révolution démocratique qu’il induit (Cf. Laure Belot « La déconnexion des élites » 2015). Quoiqu’il en soit et à ce jour, nous ne sommes toujours pas encore sortis de l’église ! L’intelligence individuelle ayant largement fait ses preuves pour créer une richesse sans compassion pour ses semblables ni respect pour l’environnement, il est temps pour atteindre un stade véritablement moral de la conscience de passer à l’étape de l’intelligence collective. Vers un universel non absolutiste pour bientôt ?

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