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MASSESCRITIQUES

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F.Pessoa au Lucernaire 3 Novembre/21Janvier2012 (Stanislas Grassian)

Publié le 27 Juin 2011 par dautresdirections in Critiques & Essais d'Esthétique

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Fernando Pessoa,

 

Pessoa - Mort d'un hétéronyme - Au Lucernaire (75006) -

3 Nov./ 21 Janv. 2012 à 18 H 30

 

 

Le créateur démasqué par ses créatures

 

Voir ce lien link pour plus d'informations sur la troupe et la pièce

 

 

Aux sources multiples de l’impératif de créer, à lire F. Pessoa mis en scène par la Cie Hic et Nunc, il y aurait d’abord l’inconfortable impossibilité d’être soi.

C’est sur ce désordre du Moi du plus célèbre des poètes Portugais, que le metteur en scène Stanislas Grassian a su tisser le fil d’une dramaturgie tout en abîme à l’image de cette œuvre complexe. Le personnage principal de la pièce est en effet l’auteur lui-même, Pessoa, mais un Pessoa tourmenté, déchiré, qui va donner en spectacle tous les visages de son intimité rongée par le doute et la folie de l’hétéronymie créatrice.

Dans ce spectacle qui se présente d’abord comme une méditation théâtrale sur la création poétique (à partir des seuls écrits de l’auteur choisis et rassemblés par S. Grassian), on apprend d’abord que créer c’est exclure des possibles. Mais on apprend aussi que, de toute évidence, rien n’est plus douloureux que de maintenir fermées ces portes en soi-même. Surtout lorsqu’on prétend dire « le mystère des choses » et que cette «vérité finale » n’est pas supportable au simple regard (Scène 6).

Pour saisir ce tout de la vie qui fait mystère en chacun, il fallait donc se démultiplier, « s’ex-traverser » (scène 3) pour atteindre à l’impossible lecture panoptique du réel ; « il m’est impossible de me fixer quelque part. Ma Patrie est toujours là où je ne suis pas » (Scène 2)

Pour ce faire, Pessoa s’inventa pas moins de trois alter ego ; Caeiro (poète de la nature, anti-spiritualiste qui voudrait se borner aux choses comme elles sont et n’en n’admet pas l’infini), Campos (l’épicurien jouisseur et émotif, au contraire partisan de l’infini des mondes comme des sensations), et Reis ( un Stoïcien triste et acide, strictement intellectuel, qui espère en se limitant au seul présent trouver une paix précaire).

Pour notre bonheur, ces trois personnages ne cessent de se télescoper inconsciemment dans l’esprit du personnage de Pessoa, entre humour et tragédie, et doivent composer, non seulement avec les difficultés de la vie mentale et intellectuelle, mais aussi avec la vie réelle, notamment le personnage d’Ophélia dont l’amour avec tout ce monde multiple, paraît bien improbable.

Outre le thème de l‘identité et de ses différences nécessaires à la création, on appréciera particulièrement dans cette pièce l’ambiguïté jouissive des frontières du monde de la représentation ; personnages/auteur, moi/folie, sujet/objet, langage/liberté, réalité/fiction ...

On dit de la « saudade » portugaise qu’elle est un état d’âme indescriptible fait de mélancolie et de tristesse quant à l’impuissance de l’homme sur son destin. Par la magie de la Cie Hic et Nunc , le spectateur  peut en toucher  la grâce sans en subir la pesanteur....

 Bonne chance à toute la troupe Hic & Nunc en Avignon off / 2011et au Lucernaire jusqu'en Janvier  2012 ......

 

Fabrice Guillaumie

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